L'ex-repreneur de Grundig en Lorraine devant la justice

L’éphémère patron de l’usine lorraine, âgé de 71 ans, sera jugé en compagnie de ses fils Lloyd et Russel, poursuivis pourabus de biens sociaux en tant que co-administrateurs de l’entreprise, de même qu’un ancien bras droit d’Alfred Gooding,de nationalité néerlandaise, Koenraad Van Driel.

La justice reproche aux quatre hommes d’avoir détourné un total d’environ 43 millions de francs (6,5 millions d’euros)dont une trentaine de millions de francs (4,5 millions d’euros) débités des comptes de l’entreprise sans justificatif.

Au-delà des malversations présumées, le dossier d’instruction met en lumière les conditions pour le moins curieuses danslesquelles s’est effectuée, en 1994, la reprise d’une usine en bonne santé financière, qui devait néanmoins déposer son bilanun an après.

« Les objectifs de la cession de l’usine de Creutzwald par le groupe Grundig (contrôlé par Philips) étaient d’ordrestratégique. Il s’agissait de céder cette usine à un groupe qui ne soit pas un concurrent », souligne le juge d’instructionJean-Pierre Pétillon dans son ordonnance de renvoi.

Grundig, qui s’est installé en Lorraine en 1970 en bénéficiant des aides liées à la reconversion du bassin houiller, décideen 1993 de concentrer sa production de téléviseurs sur ses deux autres sites européens, en Allemagne et en Autriche.

Un premier plan social, en juillet 1993, fait passer les effectifs de 880 à 530 salariés. En mars 1994, l’usine est vendueà Alfred Gooding, un homme d’affaires gallois qui a commencé sa carrière dans le bâtiment avant de créer un groupeindustriel orienté vers l’électronique.

DEMANDE D’ANNULATION DE LA PROCÉDURE

Pour reprendre l’usine lorraine, Alfred Gooding fonde une société française, Gooding Electronique SA, détenue par unesociété de droit luxembourgeois, elle-même filiale d’une société britannique.

Comme les syndicats de Grundig l’avaient déjà révélé, l’instruction montre que le repreneur, qui a bénéficié de 50millions de francs d’aides publiques (7,6 millions d’euros), n’a pas déboursé un sou dans l’opération.

La vente, pour 80 millions de francs (12,2 millions d’euros), a été entièrement financée par Grundig qui a versé 110millions de francs (16,8 millions d’euros) à la société britannique d’Alfred Gooding, dont 30 millions (4,5 millions d’euros)destinés à l’exploitation de l’entreprise.

Grundig a en outre financé le nouveau plan social mis en oeuvre, dès avril 1994, par Gooding, pour ramener les effectifsà 375 salariés.

Une procédure de redressement judiciaire sera néanmoins ouverte en juin 1995. Elle aboutira en avril 1997, après unnouveau plan social, à la session de l’entreprise au groupe français Cofidur, qui a lui-même été mis en liquidation le 2octobre dernier.

L’usine a été rachetée cette fois par le groupe algérien Aït Yala qui ne conserve que 52 emplois tandis qu’une entreprisede plasturgie s’est installée sur le site avec une cinquantaine de salariés.

« Je pense que Gooding a été payé par Grundig pour liquider l’entreprise, pour faire le sale boulot », commente Me RalphBlindauer, avocat du comité d’entreprise qui s’est porté partie civile.

L’avocat d’Alfred Gooding, Me Kiril Bougartchev, conteste les infractions mais va d’abord demander l’annulation de laprocédure au cours de laquelle son client n’a « jamais été entendu », ni même prévenu, en dépit d’un mandat d’arrêtinternational qui « n’a jamais été mis à exécution ».

source : Reuters

Auteur de l’article : comitedentreprise.com