Décentralisation : Déménagement de l'État

Clôturant les Assises des libertés locales vendredi dernier à Rouen, le Premier ministre, M. Raffarin, a présenté les grandes lignes de la «nouvelle architecture des compétences» pour une république «au plus près du terrain». Autrement dit, la réforme-phare du gouvernement, la décentralisation. «Ne nous y trompons pas. Derrière la technicité, voire l’aridité (…) de ce discours, c’est un mouvement d’ampleur que nous engageons», a déclaré le Premier ministre avant de lister les nombreux transferts de compétences de l’État vers les collectivités locales et les expérimentations que l’État consentira aux régions et aux départements «au 1er janvier 2004». Plus de 150 000 fonctionnaires devraient à terme rejoindre la fonction publique territoriale, dont 110 000 personnels de l’Éducation nationale.

Comme prévu, la région, qui «doit être l’échelon de la cohérence et de la stratégie», se verra attribuer la plus grande. Ainsi, les régions géreront l’ensemble des aides aux entreprises, superviseront les grandes infrastructures qui ne sont «pas d’intérêt national» (ports, aéroports, canaux), se verront confier la totalité de la formation professionnelle, la gestion des fonds structurels européens et de certains personnels de l’Éducation nationale (110 000 fonctionnaires techniques, ouvriers et de service, médecine scolaire, assistantes sociales, conseillers d’orientation), l’animation de la politique du tourisme à travers les délégations régionales ainsi que l’élaboration du schéma régional d’organisation sanitaire (SROS). Elles pourront également participer au financement des hôpitaux.

De leur côté, les départements hériteront de la gestion du revenu minimum d’insertion (RMI), des aides aux personnes âgées et à l’enfance, de la formation des travailleurs sociaux ainsi que de l’insertion des handicapés. Dans le domaine de l’équipement, ils auront la responsabilité d’entretenir et de gérer la plupart des routes nationales. La gestion de la carte scolaire (collèges) sera également de leur compétence. Enfin la politique locale du logement est transférée vers les structures intercommunales.

Quant aux expérimentations qui seront tentées dans certains départements ou régions, elles concerneront l’autonomie de gestion des collèges et lycées, la participation des régions aux décisions des agences régionales d’hospitalisation (ARH), la gestion du patrimoine…

Selon M. Raffarin, cette réforme destinée à simplifier et à clarifier les compétences sera accompagnée des ressources financières nécessaires qui représenteront 10 milliards d’euros. «Une part» de la taxe sur l’essence (TIPP) sera ainsi transférée aux départements et aux régions à laquelle s’ajouteront les dotations de l’État.

«Ce que nous construisons, ce n’est pas le désengagement de l’État, c’est son renforcement là où il est essentiel» a martelé M. Raffarin. Reste à convaincre les syndicats (voir le communiqué de FO) et les personnels de l’Éducation nationale qui manifesteront le 18 mars prochain précisément contre la décentralisation… au lendemain de la présentation au Congrès de la loi de révision constitutionnelle.

Auteur de l’article : comitedentreprise.com