Salariés fichés à Aventis

Interdit. Un fichier trouvé «par hasard», il y a une dizaine de jours, par Pascal Ronceray, élu CGT au comité d’entre prise de l’usine. Il travaille en équipe de nuit à la fabrication d’un des médicaments phares d’Aventis. En cherchant un renseignement sur un ordinateur de son service, il découvre une liste de salariés, travaillant ou ayant travaillé de nuit, agrémentée de commentaires dé so bligeants sur leur état de santé, leur assiduité ou leur caractère. Une pratique totalement interdite par le code du travail ou la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Le fichier a été créé en 1999, jamais annoté depuis. Dans la foulée, la CGT saisit l’inspection du travail. Direction et salariés attendent les résultats de l’enquête.

La direction, elle, parle de pratique individuelle. Il s’agirait d’une «note rédigée par un responsable de l’atelier qui s’en allait, et aurait voulu transmettre à son successeur certaines informations». Un avis que veut bien partager la CGT. «On n’est pas paranoïaque, on se refuse à penser que c’est une pratique institutionnalisée.» Le porte-parole d’Aventis précise : «Nous som mes un grand groupe, si on fouillait tous les ordinateurs des gens, on trouverait probablement des trucs in cro yables.» Le directeur du site a immédiatement fait envoyer une lettre aux salariés dans laquelle il «condamne» cette pratique et «exprime ses regrets».

Malgré tout, l’ambiance s’est sérieusement dégradée. «Tout le mon de espère être reconnu dans son travail, dit Pascal Ronceray. On est forcément très déçu quand on décou vre ce que les gens pensent vraiment de vous.» Pour certains, étaient notés «hygiène personnelle douteuse», «s’arrête pour pas grand-chose» ou bien «peu intelligent». Blessés par les annotations, des salariés n’ont pas osé en parler à leur femme. La perte de confiance en la hiérarchie se serait aggravée, la CGT dénonçant l’ajournement répété des entretiens individuels qui doivent avoir lieu entre les salariés et le responsable des ressources humaines tous les ans.

Tranchées. L’affaire de Maisons-Alfort est aussi le symbole des tensions sociales qui règnent dans le groupe. Depuis sa création en décembre 1999, par le rapprochement entre Rhône-Poulenc et Hoechst, Aventis ne cesse de se restructurer. En France, le site de recherche de Romainville, tout proche, doit être fermé. Les syndicats, CGT en tête, ont lancé une guerre des tranchées contre cette décision. La direction du groupe voit même, dans la subite mise à jour de la note, un mauvais coup du syndicat, cherchant par tous les moyens à la discréditer. Les paranoïaques ne sont pas toujours où on croit
source : Liberation

Auteur de l’article : comitedentreprise.com