30 millions d'albums vendus en 2002

Un marché de plus en plus tiré par les « stars » du genre : Titeuf, bien sûr (plus de 3 millions d’albums vendus à lui tout seul), mais aussi Largo Winch, XIII, Thorgal ou Blake et Mortimer. Ce sont eux les best-sellers. Mais une constellation de titres moins connus connaissent aussi le succès : en 2002, toujours selon « Livres Hebdo », près de 2 000 nouveautés se sont bousculées chez les libraires (rééditions comprises) ! Un record absolu. « On est dans un cercle vertueux, se réjouit Claude de Saint-Vincent, directeur général des Editions Dargaud, numéro deux du secteur derrière Glénat. La BD est davantage médiatisée, les libraires la mettent donc plus en avant, et les lecteurs suivent. » Un lectorat qui ne cesse de s’élargir : après avoir longtemps visé les enfants, puis « les 7 à 77 ans », les éditeurs s’adressent désormais à chaque type de public en particulier. Les ados se précipitent sur les mangas, les 18-35 ans sur l’heroic fantasy, les femmes sur les histoires intimistes. Même les « intellos » y viennent, grâce aux BD historiques ou adaptées d’oeuvres littéraires. Et ce n’est pas fini : l’adaptation prochaine au cinéma de héros comme Blueberry ou Michel Vaillant devrait créer de nouveaux adeptes. Un foisonnement dû à l’arrivée de nouvelles générations d’auteurs, mais aussi à des techniques marketing éprouvées : « Les grandes maisons appliquent les recettes de l’industrie du disque, estime un jeune éditeur, Emmanuel Proust. Les nouveautés sont lancées comme des produits, avec campagne de pub et placements en grandes surfaces. »
Le prix de vente est deux fois moins élevé que pour un roman Cette force de frappe ne dissuade pas les petits éditeurs de tenter leur chance, au contraire ! La France compte près de 180 maisons d’édition. Malgré la bonne santé du marché, ils sont loin d’avoir tous fait fortune. « Une BD représente un lourd investissement en temps – il faut au moins un an pour dessiner un album -, en impression et en distribution, alors que le prix de vente est deux fois moins élevé que pour un roman, souligne Claude de Saint-Vincent. Il faut vendre 10 000 exemplaires pour rentrer dans ses frais. » Problème : avec plus de 100 nouveaux titres par mois, le marché est proche de la saturation. Une situation que dénoncent les petits éditeurs : « Les « majors » produisent trop, s’agace Emmanuel Proust, qui a créé sa société il y a un an et a déjà édité sept albums. Pour l’instant, les ventes n’en souffrent pas, mais jusqu’à quand ? » L’an dernier, Dargaud a publié 30 % de titres en plus, Glénat 18 %, Delcourt 13 %… Il y a dix ans, la même escalade s’était soldée par la faillite de nombreux éditeurs et une chute brutale de la production. Le secteur aurait-il la mémoire courte ?

Auteur de l’article : comitedentreprise.com