Ferry veut valoriser la voie professionnelle

Mission. Selon un document préparatoire à cette communication, dont Libération a eu connaissance, Luc Ferry insistera sur la nécessité d’une «véritable diversification des voies de formation, pour permettre à tous de réussir». Selon lui, «le modèle de l’enseignement général et du lycée classique n’est pas le seul possible». C’est à ce point exact que la «valorisation» de l’enseignement professionnel version Ferry se heurte de plein fouet avec le «collège unique». Pour le ministre, «il faut sortir de la situation où l’orientation vers la voie professionnelle se fait par défaut et est associée à la notion d’échec scolaire, situation qui est due au fait que le collège prépare plus à la voie générale qu’à la voie professionnelle».

Pour autant, Luc Ferry ne propose pas de repenser le collège de fond en comble. L’objectif est, pour l’heure, de faire une place dans les programmes «aux activités et aux modes d’enseignement qui sont ceux des formations technologiques et professionnelles». Une mission a été confiée à l’ancien recteur Philippe Joutard, «qui rendra ses premières conclusions dès cette année scolaire». Dans le même temps, Luc Ferry insistera «sur le fait que la qualité des enseignements généraux est une composante très importante des formations professionnelles», et confirmera la poursuite du «travail de redéfinition des programmes d’enseignement général et de renouvellement des pratiques pédagogiques».

Mais le résultat le plus immédiat des mesures Ferry consistera à orienter plus d’élèves vers la voie professionnelle «dès la quatrième» ; en d’autres termes, à rétablir explicitement un palier d’orientation en fin de cinquième. Méthode : «Par convention avec les entreprises et avec les lycées professionnels de leur secteur, les collèges doivent pouvoir proposer, lorsque le besoin s’en fait sentir, des dispositifs en alternance, combinant enseignements généraux, enseignements professionnels, découverte de l’entreprise et des métiers qui s’y exercent, et offrir par là aux collégiens volontaires un mode alternatif de formation.» Ces dispositifs, qui existent au stade expérimental, «donnent de bons résultats» et doivent être étendus «en prenant garde de ne pas reconstituer une filière de relégation».

«Clarifier les parcours». Le terme choisi pour désigner ces classes de transition en dit long sur la volonté de les valoriser : «classes préparatoires à la voie professionnelle». Elles seront vantées aux élèves dans le cadre d’échanges entre collèges et lycées professionnels, tels que les «mini-stages» dont Luc Ferry avait souligné les vertus lors de sa rentrée scolaire. L’objectif est de mieux informer les élèves : selon Luc Ferry, sur les 60 000 jeunes qui sortent chaque année du système éducatif sans qualification, 53 000 quittent l’école au milieu d’un BEP ou d’un CAP, car ils n’aiment pas le métier qu’on avait choisi pour eux. Autre nouveauté : Luc Ferry voudrait ramener la durée de préparation du bac professionnel de quatre à trois ans, comme le bac général, afin «d’attirer de nouveaux élèves». D’autres pistes seront explorées pour «clarifier les parcours de formation» et pour «mieux adapter l’offre de formation».

Sur ce dernier point, «dans l’esprit des réflexions en cours sur la décentralisation», les recteurs pourront «prendre toutes les initiatives nécessaires pour définir les évolutions souhaitables de la carte des formations, en liaison étroite avec les régions». De la même façon, le label «lycée des métiers», créé par Jean-Luc Mélenchon, alors ministre de l’Enseignement professionnel, est maintenu, mais ses procédures d’obtention «seront simplifiées et gérées au niveau académique».

Luc Ferry devrait également rappeler une mesure annoncée lors de la rentrée universitaire afin de lutter contre l’échec en premier cycle des bacheliers professionnels et, dans une moindre mesure, technologiques. Elle consiste à accroître le nombre de bacheliers professionnels dans les filières courtes du supérieur, simplement en coordonnant les inscriptions en BTS et en DUT. Ce dispositif a été testé avec succès, notamment dans l’académie de Bordeaux.

Syndicats mitigés. Présentées vendredi aux syndicats, ces mesures ont reçu un accueil mitigé. Le Snes-FSU a dénoncé «la précipitation et la forme caricaturale de la concertation» et craint «la reconstitution d’une filière de relégation au collège». Le Snuep-FSU s’inquiète pour sa part d’une décentralisation qui ferait la part trop belle à «une formation professionnelle ponctuelle et au développement de formations locales sous la responsabilité de politiciens et d’entreprises». De nouvelles tables rondes seront organisées d’ici à la fin décembre et Luc Ferry effectuera «un tour de France des lycées professionnels».

Auteur de l’article : comitedentreprise.com