LDCom, l'opérateur qui monte, frise la boulimie

L’acheteur (lire Libération du 7 juin), LDCom, est coutumier des rachats. En quelques mois, la filiale du groupe de négoce Louis-Dreyfus a absorbé successivement une bonne demi-douzaine d’opérateurs: Kertel, Fortel-Squadran, Belgacom, Kaptech, et aujourd’hui 9 Telecom. Et la liste devrait s’allonger encore: d’autres firmes attendent en coulisse, comme Firstmark ou Ventelo…

Du côté des salariés de LDCom, cette frénésie d’achats inquiète un peu: «Nous voulons rester vigilants», dit sobrement un cadre. L’explosion des effectifs donne le vertige. LDCom employait 450 personnes avant de se mettre soudain à dévorer les petits opérateurs en difficulté. Il en emploie 1200 aujourd’hui. Un CE extraordinaire est convoqué cet après-midi au siège de l’entreprise à Levallois-Perret.

Grossiste. Du côté des futurs absorbés, l’ambiance n’est pas vraiment festive non plus. D’une seule bouchée, la filiale du groupe Louis-Dreyfus va ingérer encore un petit millier de salariés. Avant, selon toute vraisemblance, de découper sa dernière acquisition en tranches pour ne garder que certains de ses métiers. LDCom s’est toujours posé en grossiste de réseaux téléphoniques et, depuis peu, en fournisseur de services aux PME. Sauf qu’avec 9 Telecom Réseau, titulaire du préfixe 9, il achète dans le paquet une société tournée vers la téléphonie fixe grand public et qui emploie près de 500 salariés. D’où l’intention qui lui est prêtée de céder cette activité-là.

Chez 9 Telecom, on n’est pas dupe des temps difficiles qui s’annoncent: «Les gens savent qu’il y aura du sang», témoigne un cadre du secteur grand public. Ils ont sous les yeux les exemples pas toujours édifiants des acquisitions passées. Par exemple, Kaptech. L’opérateur, racheté, en décembre, affichait un effectif de 941 personnes. «En quelques semaines, relate un syndicaliste de la maison, la direction générale de Kaptech a été décapitée.»

Le plan social, arrêté il y a moins de quinze jours, fait état de 462 suppressions de postes, et débouche sur 339 licenciements. Un tiers de l’effectif va prendre la porte, avec des premiers départs programmés pour la fin juillet. On est amer chez Kaptech, cette start-up brillante mais à court d’argent, poussée comme un gros champignon: «Nous avions créé notre propre culture, et le repreneur l’a méprisée.» Des services entiers ont été supprimés chez Kaptech, qui faisaient double emploi avec ceux de LDCom. «Des gens de chez nous auraient pu trouver à se reclasser chez LDCom. Au lieu de cela, ils sont dégoûtés. Ils n’ont plus envie de continuer», témoigne encore le syndicaliste. Le management initié aujourd’hui par les dirigeants de LDCom détonnerait aussi après celui, plutôt cool, développé par les créateurs de Kaptech.

Précédents. L’absorption de Fortel ne s’était pas bien passée non plus. Il n’y avait pas eu de plan social, mais beaucoup de tractations menées en interne juste avant le rachat par LDCom, pour «dégraisser l’effectif». Une association d’ex-salariés se serait constituée pour dénoncer ces affaires devant le tribunal des prud’hommes. Pas de plan social non plus lors du rachat de Belgacom France. Et assez peu de départs. Ou plutôt des retours pour les salariés qui étaient venus en France, détachés de la maison mère, l’opérateur historique Belgacom, et qui ont regagné le bercail et retrouvé leur statut de fonctionnaire.

Après 9 Telecom, ce sera au tour de l’opérateur de boucle radio Firstmark (250 salariés) de se faire manger par LDCom. «Les deux comités d’entreprise ont même déjà donné leur avis et le processus est terminé», dit-on de source syndicale. Et il n’y aura pas de plan social. Reste toutefois au régulateur du secteur à donner son feu vert.

source : Libération

Auteur de l’article : comitedentreprise.com