COMITE D'ENTREPRISE

Les FAI refusent de devenir les policiers du net

Cette question fait partie des préoccupations majeures de leurs abonnés, selon l’association professionnelle des fournisseurs, l’AFA. Des abonnés échaudés par les pratiques de certains FAI, qui ont dernièrement envoyé des lettres à leurs clients, leur demandant des comptes pour avoir téléchargé de la musique ou des films, via des systèmes d’échange de fichiers tels que Kazaa.
Les FAI manieraient-ils ouvertement l’hypocrisie, en attirant les clients avec des promesses de téléchargement illimité, puis en leur tapant sur les doigts dès qu’ils utilisent Kazaa et consorts? Non seulement dans le but de respecter les injonctions des maisons de disques et autres ayants droit, mais aussi pour économiser sur la bande passante que consomment en grande quantité les apprentis pirates.

Jean-Michel Soulier, président de l’AFA, plaide la bonne foi. «Les FAI ne surveillent pas le trafic, ils ne scannent pas les disques durs, ne sont pas juges de l’activité de leurs abonnés et appliquent leurs conditions générales d’utilisation (CGU)».

Une adresse IP est une donnée personnelle

Certes, «sur requête d’un juge, la loi nous oblige à identifier la personne qui se trouve derrière une adresse IP», explique-t-il. Cette dernière sert d’identifiant à chaque ordinateur connecté sur le réseau, y compris via les systèmes d’échange de fichiers. Elle est surtout visible de tous, donc facile à recueillir par les ayants droit qui souhaitent protéger leurs oeuvres.

Mais les FAI n’ont pas autorité pour scanner eux-mêmes ces adresses. La Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) considère, par ailleurs, que cette donnée est strictement personnelle. Sa collecte sans le consentement de l’internaute concerné pourrait donc être déclarée illégale. «On ne peut pas nous demander de faire la police», se justifie Jean-Michel Soulier, «en revanche, nous pouvons prévenir nos internautes s’ils prennent des risques avec la loi».

La loi pour la confiance dans l’économie numérique (LEN), votée par l’Assemblée nationale le 26 février, exempte effectivement les FAI d’exercer une surveillance sur les contenus qu’ils transmettent ou stockent. Cette obligation s’impose cependant aux hébergeurs, pour prévenir la diffusion de contenus illégaux (article 43-11). «Elle part d’un bon sentiment, mais elle n’est pas en phase avec la directive européenne sur le commerce électronique», poursuit Jean-Michel Soulier.

En imposant le filtrage, la LEN deviendrait inapplicable

Selon lui, les moyens mis en oeuvre depuis cinq ans par l’AFA pour lutter contre les contenus de pornographie enfantine et d’incitation à la haine raciale ont prouvé leur efficacité. L’association a mis en place une hotline (www.pointdecontact.net), qui permet à chacun de signaler la présence de sites illégaux, aux autorités compétentes. Le gouvernement lui a emboîté le pas avec le site www.internet-mineurs.gouv.fr. Une action qui suffit à éradiquer ce genre de contenu des réseaux des prestataires techniques français et même européens, grâce à une coopération internationale, poursuit le président de l’AFA.

Pas de surveillance, a priori, des contenus pour les FAI, mais si la LEN est adoptée, ils pourraient être obligés de filtrer l’accès à certains sites, déclarés illégaux par la justice (article 42-12). Cette mesure, réclamée à cor et à cri par les lobbies culturels, vise plus particulièrement les systèmes d’échange de fichiers, foyers de piraterie à grande échelle selon eux.

«Le filtrage peut sembler une bonne idée, mais ce n’est probablement pas la solution car cela ne peut pas fonctionner», explique Jean-Michel Soulier. Pour lui, il est illusoire de vouloir «s’attaquer aux symptômes plutôt qu’à la maladie». «Nous demandons au gouvernement qu’une étude soit réalisée par des experts indépendants sur les modalités techniques et opérationnelles d’un tel filtrage, avant de passer des lois inapplicables».
source : zdnet.fr

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